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Mavie aime

  • Prendre les ronds points à vélo
  • Mettre France Inter en fond sonore
  • Boire du vin chaud dans la rue
  • Manger devant l'ordinateur
  • "Et on tuera tous les affreux" de Sullivan (Boris Vian)
  • Choisir
  • Boire une théière entière

Mavie rêvée

 

"...Je suis tortue et je suis belle
                 Il ne me manque que des ailes
                            Pour imiter les hirondelles..."
                                                                      Desnos


                                                

C'Est ÉCrit

Mavie n'aime pas

  • Se sentir incomprise
  • Les petits pois
  • Parler à quelqu'un qui n'écoute pas
  • Avoir l'air bête
  • Etre réveillée par ses voisins très tard ou très tôt
  • Ne pas oser
5 août 2008 2 05 /08 /août /2008 23:09
Je me glisse dans la file déjà fournie. Pendant l'été, les heures d'ouverture des Assez-Dick sont réduits. Ambiance feutrée, chuchotements, recherches de papiers dans sac à dos, regard vers le ciel plafond. Des habitués qui vaillent à leurs photocopies, au remplissage de leur dossier. Des tout nouveaux qui regardent un peu partout, prennent une brochure...viennent demander à la dame à l'accueil un ticket pour voir un conseiller.
"Je donnerai les tickets dans 5 minutes. Il n'est que 9h45 et je dois les donner à 9h50."
En face un jeune surpris mais bon, si c'est comme ça ici. Il retourne s'asseoire.
Les deux personnes avant moi ont été dirigées vers les téléphones pour effectuer des démarches. Ca arrive pour des actualisations de situation ou de petites démarches quasi-automatisées.
Vient mon tour.
J'explique ma requête.
" Vous allez utiliser les téléphones sur les côtés pour effectuer votre demande"
Je ré-explique que ce n'est pas une démarche automatique, demande à voir une personne qui puisse me remplir le document recherché.
"il n'y a pas personne au guichet aujourd'hui, tout se passe par téléphone..."
Soit. Je prends ma file près des deux combinés.
Il est 9h50, la dame de l'accueil appelle plusieurs personnes qui attendent pour leur donner leurs tickets.
Le temps passe, laissant passer quelques brides des conversations téléphoniques de mes prédécessurs.
A l'accueil, un jeune homme insiste pour voir quelqu'un, il ne comprend pas quelque chose concernant son dossier. Mais la dame de l'accueil ne peut lui répondre. "Je n'ai plus d'ordinateur ici, il faut voir ça au téléphone". Je me souviens pourtant avoir toujours vu les personnes de l'accueil prendre connaissance du dossier voire régler le probléme parfois ou informer rapidement, par l'affichage du dossier sur l'écran...
C'est mon tour de téléphone. Il est tout chaud. Je lis les instructions : rien à composer, la procédure se déclenche 6 secondes après avoir décroché. "Bienvenue Osa cède hic, veuillez composer..." Je m'exécute silencieuse. Je me sens un brin ridicule. Venant chercher un document, je me retrouve à choisir dans un menu d'actions. Les yeux fixés sur un point d'affichage pour me concentrer, je compose des chiffres, sans rien dire.
Après 3-4 minutes de ce monologue mutique, une voix humaine me salue et j'en viendrais presque à trouver ça étrange. J'explique ma demande. La personne doit faire des recherches pour trouver le papier. Elle me laisse à nouveau seule. J'essaie de trouver une contenance. Le nombre des prétendants au téléphone enfle. D'en bloquer un à attendre, je me sens tel un grain de sable qui gênerait l'engrenage.
La dame de l'accueil choisit ce moment pour faire diversion en demandant qui a rendez-vous à 10h15. Trois personnes s'avancent.
"Bonjour...Alors comme vous avez rendez-vous, vous allez aller directement au fond de la salle. Un film démarrera automatiquement d'ici trois minutes...Ensuite vous attendez que je vous donne les tickets pour rencontrer les conseillers à...(coup d'oeil sur un document épinglé près de son bureau) 10h50..."
Je remarque du coup que le document est en fait un tableau récapitulant le minutage du déroulement de chaque phase d'inscription. Plus d'imprévus que du tangible, de l'organisation, du planning. J'en déduis que les entretiens doivent être eux aussi minutés.
Mon interlocutrice au téléphone cherche toujours le document. J'espère qu'elle n'était pas chronométrée... Alors qu'elle me demande davantage de détails, je comprends qu'il se pourrait bien qu'elle soit quelque part dans le même bâtiment que moi. Les bras m'en tombent (au sens figuré: les combinés téléphoniques sont ici tant convoités!). Alors qu'elle retourne à ses recherches, je regarde le plafond. La parano m'envahit; aussi bien est-elle également en train de me regarder sur un écran vidéo . J'ai l'impression que mes pourtant-très-calmes-compagnons-de-fortune me dévisagent. Je m'imagine à leur place me dire que, quand même, si c'est compliqué, il aurait fallu directement voir ça avec un conseiller...
...
Si elle cherche toujours dans deux minutes, j'envisage de m'inventer un dialogue avec le combiné...
...
Derrière moi, il y a eu turn over sur l'autre combiné. C'est une jeune femme dont je n'entends que la voix, discrète. Un ange passe à ce moment dans lassée d'hics.
"Je voulais signaler...un changement de situation, oui...je suis enceinte".
Je me retourne et la regarde. Elle doit être en tout début de grossesse, rien ne se voit.

Je me sens un peu bête: Dans ce local où tout est fait pour préserver la distance, l'anonymat, pour que la colère s'en aille ailleurs, faute de responsables présents, ici, physiquement, je me suis retrouvée dans l'intimité d'une inconnue, une jeune femme dicrète qui ne réclamait peut-être pas tant de témoin.

Elle venait juste signaler un changement de situation.


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commentaires

G
J'espère au moins que tu as obtenu ce que tu étais venue chercher. On dirait une sorte de film d'anticipation des années 50. Dire qu'il y a des politiciens, eux-mêmes se servant plus que largement dans les caisses collectives, qui stigmatisent les chômeurs comme voulant abuser d'une espèce de rente qui leur serait donnée. Il faudrait les envoyer passer ne serait-ce qu'une journée dans la condition du demandeur d'emploi de base.
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M
<br /> Malheureusement non! Nous avions convenu que le papier me serait envoyé ou que je serais appelée en cas de pb... et je reste sans nouvelle. On ne m'a pas proposée de le recupérer sous la porte d'un<br /> bureau ou dans un distributeur... ;-)<br /> Pour ta dernière remarque, c'est vrai que ça passe des fois l'entendement. Il faut une sacrée dose de débrouillardise et de plus en plus ce sont les demandeurs d'emploi qui s'entraident entre eux<br /> pour remplir des papiers, obtenir des attestations au distributeur...ça m'arrive régulièrement de donner ce genre de coups de main quand je vais faire mes démarches. Je ne blâme pas les employés,<br /> je ne les envie vraiment pas. Dans l'agence où j'étais l'autre jour, les bureaux donnent sur la pièce principale, tous les stores sont baissés, on entendait que les bruits de pas de porte...une<br /> impression super étrange...<br /> <br /> <br />